lundi 18 décembre 2006

Éthanol comme dans... électoral

Ceux qui suivent, même de loin, la politique américaine, ont dû rigoler comme moi en entendant la ministre fédérale de l’environnement, Rona Ambrose, réunir ses homologues provinciaux pour annoncer qu’il devrait y avoir cinq pour cent d’éthanol dans l’essence au Canada, à compter de 2010.Parce que tout le monde sait qu’aux Etats-Unis, les subventions à la production d’éthanol sont largement considérées comme l’un des exemples les plus évidents de gaspillage des fonds publics et ne survivent que pour des raisons strictement politiques. Ou, plus précisément, à cause du calendrier électoral des campagnes à la présidence.L’État qui produit le plus de maïs et d’éthanol aux Etats-Unis est l’Iowa. Or, c’est aussi, en janvier à tous les quatre ans, l’État qui lance le long processus du choix des candidats à la présidence des Etats-Unis.

C’est connu, quiconque a des ambitions présidentielles devient presque automatiquement un grand partisan des subventions à l’éthanol. Sinon, il est inutile de songer à se présenter aux caucus de l’Iowa. Et passer son tour en Iowa, ça regarde bien mal…Cet article tiré du quotidien USA Today illustre bien ce qui se passe dès qu’on débat des subventions à l’éthanol au Sénat américain. On voit tout de suite qui a des ambitions et qui n’en a pas.C’est tellement connu que ça se retrouve même dans les œuvres de fiction. Les amateurs de la série West Wing – qui sont sans doute encore en deuil ! – se souviendront que le candidat républicain Arnold Vinick se retrouve confronté à tout un dilemme quand il fait campagne en Iowa en ayant, pendant toute sa carrière, voté contre le gaspillage que constituait l’éthanol. C’était une transposition à peine voilée de ce qui était arrivé au sénateur républicain John McCain avant les élections de 2000. Signe que McCain est candidat à la présidentielle de 2008, il a commencé à modifier sa position sur l’éthanol. Autrefois, il aimait à répéter que l’éthanol n’était bon «ni pour les consommateurs, ni pour les contribuables, ni pour l’environnement».Pour ceux qui doutaient encore que Hillary Clinton serait candidate à la présidence en 2008, sachez qu’elle a fait son «coming out» en faveur de l’éthanol pas plus tard qu’hier. Autrefois, elle votait contre les subventions à l’éthanol, comme McCain.On calcule qu’entre 1979 et 2001, aux Etats-Unis, les subventions à l’industrie de l’éthanol ont coûté 11 milliards de dollars aux contribuables américains. Le coût devrait atteindre deux milliards par an d’ici 2012. Mais, sans ces subventions, l’industrie de l’éthanol s’écroulerait tout simplement.Outre qu’ici aussi, il faudrait des subventions à la fabrication d’éthanol, il faut noter que le Canada ne produit pas le quart du maïs qui serait nécessaire pour fabriquer les cinq pour cent d’éthanol requis pour atteindre l’objectif de Mme Ambrose. Une telle transformation de l’agriculture canadienne serait, en soi, une catastrophe écologique. Ce gouvernement qui suit de près ce qui se passe aux Etats-Unis devrait pourtant le savoir : l’éthanol n’est qu’une grosse balloune électorale. Mais comme c’est un passage obligé des campagnes présidentielles, cela assure la survie de ce ballon qui coûte cher et n’a jamais donné les résultats escomptés. Les groupes environnementaux canadiens disent que si l’éthanol est une bonne idée, ce n’est pas une manière réaliste d’atteindre nos objectifs du Protocole de Kyoto sur la réduction des gaz à effet de serre. Bref, le gouvernement Harper vient d’importer une autre politique environnementale chez nos voisins du Sud. Mais, ici aussi, ce ne sera rien d'autre qu’un ballon électoral.

source : canadienne

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